04/06/2012
UN PREMIER SAUMON À LA MICROCENTRALE DE ROANNE, SUR LA LOIRE : L’ESPOIR RENAÎT POUR LE RETOUR DES MIGRATEURS SUR LA LOIRE AMONT.
Un saumon sauvage de près d’un mètre a été observé, le 3 mai 2012 dans
l’échelle à migrateurs de la microcentrale de Roanne. Ce poisson est le
premier à revenir dans la Loire amont depuis la construction du barrage
EDF de Grangent (1957) qui avait totalement bloqué ses migrations.
L’installation, entre juillet 2010 et mars 2012, d’une microcentrale de
6 MW sur le barrage de navigation de Roanne (1909) a été accompagnée,
conformément à la règlementation, de l’édification de deux échelles à
migrateurs. Quelques semaines après sa mise en route, le passage de ce
premier poisson ouvre tous les espoirs de reconquête écologique de la
Loire amont.
Un tel retour est, pour les acteurs impliqués depuis des décennies dans
la protection de la Loire sauvage et de ses populations de migrateurs,
une nouvelle extraordinaire. Il symbolise la capacité de notre pays,
s’il s’en donne les moyens, à restaurer sa biodiversité. Il illustre le
fait que, si nous restaurons la continuité écologique des fleuves, les
migrateurs reviennent. Il montre que, quand les acteurs coopèrent, il
est possible de concilier production d’électricité renouvelable et
retour des migrateurs, au fondement de la « Convention pour une
hydroélectricité durable » signée entre ONG, hydroélectriciens, élus et
Etat en juin 2010, dans le cadre du Grenelle de l’environnement. Enfin,
il stimule la mise en œuvre de la « Stratégie Nationale des Poissons
Migrateurs » de 2010 : il faut « réouvrir les fleuves », sur tous les
bassins.
> Un sauvetage in extremis grâce au Plan Loire Grandeur Nature.
Le saumon atlantique (Salmo salar) de l’axe Loire-Allier est le dernier
saumon de longue migration en Europe. Il naît dans le Haut-Allier, seul
affluent accessible du fait de l’absence de barrages, hormis celui de
Poutès, bientôt effacé. Après deux à trois années en eau douce, il
rejoint l’Océan pour quelques années. Adulte, il retourne se reproduire
dans les eaux de sa naissance. Cet animal magnifique a failli
disparaître au début des années 90, avec la présence de trop de
barrages : sur une population estimée à 100 000 individus au XVIII éme
siècle, il ne subsistait qu’une centaine de poissons. Le « Plan Loire
Grandeur Nature », lancé en 1994, a permis l’effacement de divers
barrages, la construction de passes, l’arrêt de la pêche, le soutien
des populations avec le « Conservatoire National du Saumon Sauvage » de
Chanteuges et donc de sortir le saumon de l’abîme. Cette année, 784
poissons ont déjà franchi la passe de Vichy.
> Le saumon à Serre de la Fare !
Ce retour est un signal pour enfin lancer, entre tous les acteurs
(Etablissement Public Loire, Agence de l’Eau Loire Bretagne, Dreal de
bassin, DDT de la Loire, Onema, collectivités et hydroélectriciens et
ONG) une stratégie pour le retour des saumons et des autres migrateurs
(aloses, lamproies, anguilles) sur la Loire amont, depuis le barrage de
Villerest (1983) jusqu’à Serre de la Fare, en Haute Loire. Les gorges
sauvées suite à la mobilisation de Loire Vivante doivent un jour revoir
les saumons ! Il faut sans tarder lancer le travail de recherche, avec
un horizon d’une dizaine d’années, mobiliser compétences, énergies,
ressources pour ramener les saumons sur la Loire amont et développer
ainsi l’attractivité du territoire.
Au moment où se précisent les menaces sur la Semène, une des rares
rivières libres du département de la Loire, menacée par le projet de
barrage des Plats, ce saumon nous invite à croire qu’il est possible de
retrouver un équilibre trop longtemps négligé entre l’homme et les
fleuves.
© Jo Benn / WWF-Canon